LE GRAND PRIX DE BORDEAUX DU 9 MAI 1954 SUR LE CIRCUIT DES QUINCONCES
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Affiche du GP 1954 - archives ACSO |
Ce millésime 54 doit être celui de la confirmation, presque de la maturité pour l’ACSO afin d’installer l’épreuve dans un paysage sportif en pleine mutation. En effet, face au développement du championnat du monde, de moins en moins de courses de Formule 1 se disputent en dehors de ce cadre officiel. Par ailleurs, une nouvelle règlementation a été adoptée pour cette année, permettant la création de nouvelles monoplaces et le retour en grâce de la Formule 1 par le biais de la Formule Internationale avec des moteurs de 2,5 litres atmosphériques. Une motorisation de 750cm3 suralimentée est également possible, mais n’est adoptée par aucun constructeur.
LA PREPARATION
Preuve de la reconnaissance de la course Bordelaise, cette édition 1954 du Grand Prix de Bordeaux est désignée « Prix du Président de la République » par René Coty, dont le mandat a débuté le 16 janvier après son élection lors du vote du 23 décembre 1953, à l’issue de treize tours de scrutin ! Le vainqueur remportera donc un superbe vase de Sèvres offert par le Président de la République.
Le visage de Bordeaux a un peu changé sur les Quais depuis quelques mois. En effet, le 17 avril marque l’achèvement des travaux d’élargissement du Pont de Pierre et un nouveau goudron a été posé sur les Quais, dont le tracé du circuit peut bénéficier dans sa majeure partie.
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Plan du circuit du GP 1954 - archives ACSO |
L’ACSO a bien entendu les suggestions de pilotes et d’observateurs sur le format de son épreuve. Pour essayer de casser cette longue course et de mieux rythmer la compétition, le nouveau président de l’ASACSO, Armand Fourcade, propose de faire courir deux manches qualificatives et une finale regroupant les quinze meilleurs pilotes. Toutefois, à l’annonce de ce changement majeur de philosophie, plusieurs constructeurs se montrent opposés à une telle évolution. Enzo Ferrari lui-même souhaite le maintien d’une course unique et d’un format Grand Prix sur le tracé des Quinconces. Il s’en explique dans un courrier adressé aux organisateurs : « Bordeaux est une belle victoire à afficher à notre palmarès. Nous tenons absolument, si nous nous y déplaçons, à y gagner. Or, seule la formule Grand Prix nous permet d’utiliser le maximum d’atouts. Nous préférons vraiment 300 kilomètres ou trois heures de course. »
Se rangeant à l’avis du constructeur champion du monde, l’ACSO décide finalement de maintenir une épreuve unique pour les monoplaces répondants à la nouvelle Formule 1, et le Grand Prix de Bordeaux 1954 aura bien lieu le dimanche 9 mai.
Comme de coutume, la première annonce officielle de participation au Grand Prix est réservée à l’écurie Gordini. Pour raisons financières, Gordini a conservé ses châssis T16, équipées d’un nouveau moteur, en espérant s’exprimer sur les circuits sinueux où les qualités du moteur à bas régime et la faible consommation devraient permettre d’être compétitifs. Jean Behra, son leader récemment vainqueur à Pau, a parfaitement illustré cette théorie. Il sera à Bordeaux le chef de file d’un quatuor complété par Elie Bayol, Jacques Pollet et Georges Berger, lequel va ainsi disputer sa première course de la saison avec une Gordini repeinte en jaune, Belgique oblige.
Les quatre Gordini rivaliseront avec autant de Ferrari et de Maserati ! La Scuderia Ferrari sera représentée par Maurice Trintignant et l’Argentin Froilan Gonzalez. Le pilote Argentin est déjà entré dans l‘histoire de la Scuderia en remportant le Grand Prix d’Angleterre 1951, la première victoire de l’écurie dans le cadre du championnat du monde. A Bordeaux, il sera tout juste de retour d’Argentine où il s’était rendu après la course Paloise pour pouvoir voter aux élections législatives. Par respect pour la parole donnée, et par intérêt sportif, la Scuderia Ferrari a ainsi privilégié son engagement à Bordeaux au détriment d’une participation au Grand Prix de Naples. Prévue le même jour, l’épreuve Italienne se retrouve privée des voitures rouges et ses organisateurs décident purement et simplement de supprimer la course. Avec les blessures de Farina et de Hawthorn, Enzo Ferrari n’avait plus suffisamment de pilotes de premier plan pour constituer deux équipes différentes.
Louis Rosier et Robert Manzon complètent les rangs des Ferrari, au volant de voitures appartenant à l’écurie personnelle du vainqueur de l’édition 1951. La monoplace de Rosier, avec sa couleur bleue, est d’ailleurs la même que celle utilisée l’année précédente, simplement équipée par l’usine de Maranello d’un moteur conforme à la nouvelle réglementation.
Du côté des Maserati, Roberto Mieres et Harry Schell seront des pilotes semi-officiels, et les engagements privés du Prince Bira et de Stirling Moss renforcent l’impact des nouvelles Maserati 250F sur le plateau Bordelais. Il faut préciser que si les trois premiers bénéficient d’anciennes Maserati A6GCM reconditionnées par l’usine dans une version transitoire selon les spécifications des 250F, Stirling Moss bénéficie lui bien véritablement d’une nouvelle Maserati 250F. Il est amusant de savoir que c’est Moss lui-même qui a téléphoné au Président Baillot d’Estivaux pour proposer sa participation au volant d’une Maserati. Pour éviter le nombre 13, les numéros de course sont traditionnellement pairs. Moss a toutefois demandé le numéro 7, son numéro fétiche, qui lui a été attribué exceptionnellement.
Hasard ou coïncidence, les Ferrari et les Maserati sont parties d’Italie le même jour, le mercredi 5 mai, pour pouvoir rallier Bordeaux en temps et en heure pour les premiers essais deux jours plus tard. Dès le mercredi soir, le seul concurrent à ne pas s’engager sur une Ferrari, une Maserati ou une Gordini, Peter Whitehead, est lui déjà arrivé à Bordeaux avec sa Cooper et il en profite pour reconnaitre le circuit à bord d’une voiture de tourisme.
Pour le public, les observateurs et même la plupart des pilotes, un favori est tout désigné pour la course, le Français Jean Behra. Sur sa Gordini, il vient de remporter le Grand Prix de Pau avec seulement quelques centièmes de seconde d’avance sur Maurice Trintignant. Sud Ouest présente d’ailleurs le rendez-vous bordelais comme une revanche de la course paloise et même plus précisément une revanche entre Behra et Trintignant. Et pour Trintignant, il s’agirait de remporter enfin une course après deux deuxièmes places successives à Syracuse et à Pau.
Comme prévu, les premiers essais débutent le vendredi 7 mai à 17 heures. Froilan Gonzalez signe le meilleur temps à plus de 102 km/h de moyenne sur sa Ferrari. Cette séance est une véritable confirmation d’un trio de favori constitué de Gonzalez, Behra et Trintignant qui réalisent les trois meilleurs temps. L’opposition Ferrari-Gordini pourrait être arbitrée par Maserati, mais les monoplaces Italiennes ont été retardées et ne sont pas encore arrivées à Bordeaux. Les pilotes sont donc restés aux stands, observant la monoplace de Moss sur la piste. Seul représentant de la marque au trident lors de ces essais, il devient le cinquième homme à dépasser les 100km/h de moyenne en ce vendredi soir.
LES COURSES ANNEXES
Pour sa part, le MCB reste naturellement associé à cette manifestation mais décide d’abandonner l’épreuve des sidecars. La priorité est donnée aux courses sur deux roues avec plusieurs plateaux de motos. Trois courses seront ainsi au programme de la quatrième édition des « Circuits Internationaux motocyclistes de Bordeaux », dont une réservée aux pilotes nationaux en 175 cm3 avec plusieurs pilotes Bordelais et de la région. Pour les 350cm3 et les 500cm3, ce sont de prestigieux plateaux internationaux qui sont constitués. Face à des Anglais, Australiens ou Irlandais, Pierre Monneret et Jean-Pierre Bayle seront les deux principaux porte-drapeaux tricolores. Ce dernier présente d’ailleurs la particularité d’être inscrit dans les trois courses, et donc de faire pleinement profiter les spectateurs de son casque arborant l’emblème de la ville de Bordeaux.
Le samedi 8 mai est le cadre de six heures de sports mécaniques ininterrompus. Un samedi ensoleillé qui permet aux pilotes de profiter de la qualité de la nouvelle chaussée. A 14 heures, dix-sept motards, et parmi eux certains qui avaient raccroché leur casque depuis plusieurs années, prennent le départ de l’épreuve des 175cm3. À la suite des essais de la veille, Bayle bénéficie de la pole position devant Roger Fontès et André Uzé. Mais c’est bien le Carcassonnais Henri Cuin qui prend le meilleur départ. Il conserve la tête de la course jusqu’au 4ème tour, dépassé par Bayle. Derrière eux, de nombreux arrêts sont à déplorer, comme celui de Claude Soulet qui abandonne victime de crampes. Bayle multiplie les records du tour et conforte sa place devant Cuin et Alain Bonnet, bien revenu… mais ce dernier chute à trois tours de l’arrivée. Finalement, c’est une victoire facile mais méritée pour l’idole du public, le Bordelais Jean-Pierre Bayle sur sa MV Agusta. Le 2 mai, le dimanche précédent ce rendez-vous, Bayle avait pu faire le plein de confiance en remportant déjà la course des 175cm3 du Grand Prix de Marseille, Pierre Monneret faisant de même en 500cm3.
Quelques minutes plus tard, dix-huit nouvelles motos, mais cette fois d’une cylindrée de 350cm3, s’élancent à leur tour pour 73 kilomètres de course. Pour certains observateurs, « le plateau réuni par les organisateurs Bordelais est absolument remarquable et il en fut présenté peu de semblables en France depuis la guerre » (Motocycles, juin 1954). Tommy Wood prend le commandement devant les Australiens Jack Ahearn et Gordon Laing. La lutte entre les leaders est intense et les dépassements sont nombreux. Après une course magnifique et riche en suspens, un trio se détache aux 2/3 de l’épreuve, composé de Laing, Monneret et Ahearn. Leader depuis le 4ème tour malgré de nombreux assauts de ses concurrents, Jack Ahearn remporte cette course avec quelques secondes d’avance.
Il est 16 heures, et les Tourisme amélioré vont pouvoir prendre la piste. Cette épreuve devenue charismatique à Bordeaux connait de nouvelles évolutions. Désormais, la bascule entre les deux catégories de voitures engagées se situe à 750 cm3, avec en outre l’exclusion des véhicules trop préparés et s’apparentant à de véritables voitures de sport. Aucun forfait n’est à signaler au regard de la liste des engagés et treize pilotes locaux vont pouvoir en découdre. Dominateur l’année précédente, Lucien Barthe doit malheureusement rapidement abandonner sur problèmes mécaniques alors que Marcel Lauga est déjà bien installé en tête. Le classement semble d’ailleurs figé dès la mi-course, et Lauga l’emporte devant Paul Armagnac. Situation similaire dans le classement spécifique à la catégorie des petites cylindrées avec la domination sans partage du grand favori, Raymond Rispal.
Dernière course de la journée, et du planning du MCB, l’épreuve des 500cm3 démarre à 17 heures. A la surprise générale, les deux motos de Bayle et Monneret doivent abandonner juste après le départ, alors que Wood et Jean Collot luttent pour occuper la tête. Les deux Norton se doublent, se redoublent et mènent un train d’enfer durant les dix premiers tours, avant que Collot ne connaisse des ennuis avec sa monture. Peu avant la mi-course, c’est au tour de Wood de se trouver en difficulté et le Belge Firmin Dauwe en profite pour récupérer le commandement. Dans cette course par élimination, la Norton de Dauwe s’avère la mieux au point et il remporte assez facilement une course tronquée où seulement six des seize partants franchissent la ligne d’arrivée. Aux problèmes de fiabilité s’ajoutent des suspicions de certains observateurs, qui accusent à demi-mots des pilotes de ne pas s’être impliqués complètement dans cette dernière course pour ne pas être trop fatigué avant de partir pour Grenoble où une autre épreuve est prévue dès le lendemain ! Un « Circuit du Dauphiné » qui verra ainsi la victoire en 350cm3 et en 500cm3 de Pierre Monneret, Jean-Pierre Bayle l’emportant en 250cm3…
LE GRAND PRIX
A partir de 18h15, pour finir cette journée du samedi, les monoplaces affrontent le chronomètre pour déterminer la grille de départ de la course du lendemain. A ce jeu, Maurice Trintignant se montre le plus rapide devant son coéquipier Gonzalez puis Behra. Les trois favoris continuent donc de dominer les débats. Illustration de la vitesse des voitures durant cette séance qualificative, seuls Pollet et Whitehead ne parviennent pas à franchir le seuil symbolique des 100km/h de moyenne sur un tour parmi les treize engagés.
Pour présenter l’atmosphère de ce Grand Prix de Bordeaux, plongeons dans le superbe texte écrit par René Labbe dans les colonnes de Sud Ouest Dimanche en ce 9 mai : « Cet après-midi, sur 300 kilomètres autour de l’Esplanade des Quinconces, les plus grandes marques vont une fois encore se mesurer. Une fois encore l’élite de leurs pilotes sera là ; leurs mécaniciens les plus subtils, leur organisation effroyablement onéreuse ; les chefs d’écurie seront sur le bord de la piste ; au bout du fil, les directeurs des firmes attendront, s’ils ne sont pas eux-mêmes sur le circuit, fébrilement le résultat de l’épreuve. Qui gagnera ? Quel moteur ? Quel as ? Maserati ? Behra ? Gordini ? Ferrari ? Manzon, Gonzalez, Rosier ? Les noms des mécaniciens et des hommes se confondent dans cette lutte infernale où les hommes font corps avec leur moteur, où ils semblent faire partie intégrante de leur engin. Un bolide de course se compose d’un système nerveux et de bielles, d’un cerveau et de freins, de sang et d’essence... On a dit qu’un an de guerre faisait progresser de dix ans la technique des armements. Les courses sont les guerres du monde de l’automobile. Chaque course de deux heures est un banc d’essai où s’éprouvent des moteurs, toujours plus puissants, des éléments toujours plus robustes. »
Après le briefing de Maurice Henry, le Directeur de course, les pilotes montent dans leurs monoplaces sous un ciel menaçant. Cela n’empêche pas Stirling Moss, en bon Anglais, de se préparer à piloter avec un simple polo blanc, à manches courtes, alors qu’il répond aux questions de Georges Fraichard, toujours présent pour faire vivre l’épreuve aux spectateurs.
Confirmant sa pole position, Maurice Trintignant bondit en tête au baisser du drapeau, à 15 heures, alors que Rosier cale mais réussit à se relancer. Avant le 10ème tour, Whitehead et Rosier sont déjà contraints à l’abandon, la réparation de fortune du pignon de distribution faite la veille n’ayant pas tenue pour ce dernier. Au même moment, Jean Behra réussit l’exploit de doubler les deux Ferrari à l’occasion du même freinage, sous les acclamations de la foule. Mais quatre boucles plus tard, c’est au tour de Gonzalez de le dépasser pour devenir le troisième leader de l’épreuve. A ce moment-là, telle une fidèle amie ou une invitée régulière du Grand Prix de Bordeaux, la pluie est de retour sur le circuit. Par conséquent, la piste devient très glissante et piégeuse, alors que les flaques d’eau sont nombreuses sur ce bitume urbain.
Et le trio de tête, qui avait réalisé un début de course conforme aux rêves de tous, va être décapité par ces changements de conditions climatiques. Au 15ème tour, Trintignant doit regagner le stand Ferrari pour changer les bougies et régler les freins de sa monoplace. Il en profite pour s’équiper d’un casque avec une visière panoramique afin d’essayer d’évacuer les gouttes de pluie. En proie également à des difficultés de freinage, Behra de son côté arrive à ralentir sa Gordini en utilisant sa boite de vitesse. Deux tours plus tard, les malheurs de Maserati durant ce week-end se poursuivent quand Schell, alors quatrième, subit l’éclatement en pleine piste du carter d’embrayage entre ses jambes. Surpris, il dérape, heurte les bottes de paille et doit abandonner.
Au moment où la pluie redouble, Behra (n°2), qui maintenant se trouve avec une grosse dizaine de secondes de retard de Gonzalez, doit à son tour s’arrêter au stand au 34ème tour… Mais il n’arrive pas à repartir ! La boite de vitesse, trop sollicitée, reste bloquée sur le premier rapport. Dès lors, Gonzalez possède plus d’une minute d’avance sur Trintignant, lequel devance Bira et Moss. Et alors que le Prince Bira doit à son tour stopper sa course, le stand Gordini ordonne à Bayol de s’arrêter pour laisser le volant de sa monoplace à Behra et permettre à ce dernier de reprendre sa course. Une manœuvre courante à cette époque…
Mais Bayol poursuit sa route.
Après le changement des quatre pneus de Moss au 48ème tour, Bayol s’empare de la troisième place. La pluie se calme et disparait peu à peu, mais c’est un nouvel orage qui gronde de plus en plus sur la Place des Quinconces, et plus précisément dans la tête d’Amédée Gordini face à l’attitude de son pilote Marseillais. Ce n’est qu’au 106ème tour qu’il s’arrête devant ses mécaniciens, pour se plaindre de sa boite de vitesse puis repartir, toujours au volant.
Sur la piste, un cylindre du moteur Ferrari de Trintignant laisse passer de l’huile. Ralenti, Pétoulet doit donc laisser passer Manzon, superbement revenu aux avant-postes après un tête-à-queue au premier tour, mais il réussit à contenir le retour de Moss et de sa Maserati verte au nez crème. Finalement, vêtu de son pull bleu recouvrant un polo jaune, Froilan Gonzalez passe en grand vainqueur sous le drapeau à damier. Il a mené sa course avec une belle régularité et il a pu éviter les problèmes techniques. Derrière lui, Manzon et Trintignant permettent donc aux Ferrari de signer un beau triplé.
Traditionnellement, la journée se termine dans les salons de l’Hôtel de Ville pour la remise des trophées. Mais les festivités prévues sont annulées par l’ACSO en raison de l’actualité et de l’annonce de la chute de Dien Bien Phu, en Indochine. Annoncée puis démentie depuis plusieurs jours, cette défaite de l’Armée Française provoque la stupeur et une très grande émotion dans tout le pays. Les petits fours du cocktail seront offerts aux Petites Sœurs des Pauvres et à l’Hôpital Militaire Robert Picqué.
Deux moments spéciaux sont toutefois à signaler lors de cette soirée à l’ambiance particulière. Tout d’abord la remise à Amédée Gordini, des mains même de Jean Behra, d’une valise de voyage offerte par le quotidien Sud Ouest pour l’ensemble de son œuvre. Puis la Coupe d’Honneur de l’ACSO offerte à Nello Ugolini, le Directeur de course de Ferrari.
Bien après les heures de lutte sportive, Froilan Gonzalez fut surpris en train de faire faire le plein de sa voiture personnelle dans une station-service du Quai des Chartrons, comme un automobiliste ordinaire.
Concernant l’équipe Gordini, cette course laisse des traces. Bayol a montré son refus d’obtempérer aux signes de son Directeur d’équipe et à ceux de son coéquipier. Behra lui avait en effet clairement montré le drapeau demandant le remplacement. Hué par la foule pour avoir refusé de laisser son héros reprendre la course, Bayol expliqua après la course : « Je n’avais aucune raison de m’arrêter. Behra, c’est une certitude, n’aurait pas fait mieux que moi, car j’avais des difficultés avec ma boite de vitesse, ne disposant que de la quatrième. » (L’Equipe, 10 mai 1954) Des explications qui sont loin de convaincre Amédée Gordini qui décide d’exclure Elie Bayol de son équipe à la suite de ce comportement.
Enfin, pour Moss, voici comment il décrit dans son ouvrage « All my races » cette course de Bordeaux, la première disputée au volant de sa Maserati 250F portant le numéro de châssis 2508 : « Ma première course avec cette auto sur le très serré circuit de Bordeaux fut quelque chose comme une grande leçon. Les conditions étaient humides au départ et je roulais en Dunlop. Alf [Francis] pouvait voir depuis les stands que je n’étais pas content. Aussitôt il bondit chez Pirelli et demanda à acheter quatre pneus. Ils furent rapidement montés sur les jantes de secours et il me fit rentrer pour un changement de roues. La voiture fut immédiatement plus efficace, je fis au mieux pendant deux tours pour finir quatrième derrière la Ferrari de Maurice Trintignant. C’était un début prometteur. »
Restent des questions : cette course a-t-elle été perturbée par la pluie ? Oui, incontestablement. A-t-elle été faussée ? Peut-être, surtout pour les observateurs et les spectateurs frustrés de l’alléchante revanche de Pau.
Toujours est-il que l’organisation de l’ACSO s’est une nouvelle fois révélée sans faille. Un constat clairement exprimé par le vainqueur lui-même, qui disputait sa première course à Bordeaux : « C’est une organisation grandiose, sans une erreur, sans un reproche. On est tranquille sur la piste, on ne voit personne, on court en vase clos. » (Sud Ouest, 11 mai 1954)
ENGAGÉS ET CLASSEMENTS DES COURSES ANNEXES
Engagés (tous français)
1 - Jean-Pierre BAYLE - MV Agusta
3 - Gaston DUBOIS - Puch
4 - Jacques LAGREZE - Puch
5 - Henri CUIN - Arcizet
6 - Guy FOURES
7 - André UZE - MV Agusta
8 - Paul NOEL - Alcyon
9 - Roger FONTES - Alcyon
10 - Serge VIDAL
11 - Raymond POHU - Puch
12 - Henri JEAN
14 - Alain BONNET - New-Map
15 - Adrien BAURENS - Griffon
16 - Claude SOULET - MV Agusta
17 - Charles DULOUARD - Mondial
18 - Jean DELPECH - Jonghi
19 - Jules MEDANT - Jonghi
Classement
1. Jean-Pierre BAYLE en 48’00’’
2. CUIN, à 2’01’’
3. DUBOIS, à 4 tours
4. LAGREZE, à 4 tours
5. POHU, à 4 tours
6. MEDANT, à 4 tours
7. BONNET, à 6 tours
8. BAURENS, à 8 tours
9. VIDAL, à 8 tours
MOTO 350 cm3
Engagés
1 - Jean-Pierre BAYLE (France) - Norton
3 - Alfredo FLORES (Espagne) - Velocette
5 - Charles BRUGUIERE (Angleterre) - A.J.S.
7 - Javier ORTUETA (Espagne) - Norton
9 - Bob MATTHEWS (Irlande) - Velocette
11 - Barry HAYNES (Angleterre) - A.J.S.
17 - Georges BURGRAFF (France) - Norton
19 - Keith CAMPBELL (Australie) - Norton
21 - Jacques COLLOT (France) - Norton
23 - Roland GAUCH (France) - Norton
25 - Firmin DAUWE (Belgique) - Norton
27 - Tommy WOOD (Angleterre) - Norton
29 - Gordon LAING (Australie) - Norton
31 - Jean BONNIN (France) - Norton
33 - Auguste GOFFIN (Belgique) - Norton
35 - Pierre MONNERET (France) - A.J.S.
37 - THOMPSON (Australie) - Norton
39 - Jack AHEARN (Australie) - Norton
Classement
1. Jack AHEARN en 48’02’’
2. LAING, à 03’’
3. MONNERET, à 26’’
4. WOOD, à 32’’
5. DAUWE, à 37’’
6. COLLOT, à 1’16’’
7. GOFFIN, à 1 tour
8. HAYNES, à 2 tours
9. MATTHEWS, à 3 tours
10. BONNIN, à 3 tours
11. BRUGUIERE, à 4 tours
12. ORTUETA, à 6 tours
13. BURGRAFF, à 9 tours
MOTO 500 cm3
Engagés
2 - Jean-Pierre BAYLE (France) - Norton
4 - Alfredo FLORES (Espagne) - Norton
6 - Charles BRUGUIERE (Angleterre) - Norton
8 - Javier ORTUETA (Espagne) - Norton
10 - Bob MATTHEWS (Irlande) - Norton
12 - Barry HAINES (Angleterre) - Norton
16 - Georges BURGRAFF (France) - Norton
18 - Keith CAMPBELL (Australie) - Norton
22 - Roland GAUCH (France) - Norton
24 - Firmin DAUWE (Belgique) - Norton
26 - Tommy WOOD (Angleterre) - Norton
28 - Gordon LAING (Australie) - Norton
30 - Jean BONNIN (France) - Norton
32 - Auguste GOFFIN (Belgique) - Norton
34 - Pierre MONNERET (France) - Matchless
37 - THOMPSON (Australie) - Norton
39 - Jack AHEARN (Australie) - Norton
Classement
1. Firmin DAUWE en 1h03’28’’
2. BRUGUIERE, à 1’26’’
3. BONNIN, à 1 tour
4. BURGRAFF, à 2 tours
5. GAUCH, à 3 tours
6. FLORES, à 4 tours
TOURISME
De 751 à 1300 cm3
Engagés (tous français)
2 - Marcel LAUGA - Simca Aronde
4 - Paul ARMAGNAC - Simca Aronde
6 - LOUBIERE - Simca Aronde
8 - René AMY - Peugeot 203
14 - Jean-Claude MOTHE - Peugeot 203
16 - Lucien BARTHE - Simca
Moins de 750 cm3
Engagés (tous français)
18 - Henri de BRUCHARD - Renault
22 - Jean-René BIGRE - Renault
26 - Marcel PIVETEAU - Renault
30 - Raymond RISPAL - Renault
32 - CANITROT - Renault
34 - Elie DARROMAN - Renault
36 - Maurice DUPEYRON - Panhard
Classement
1. Marcel LAUGA en 47’13’’7
2. ARMAGNAC, à 1’04’’
3. AMY, à 1’49’’
4. RISPAL, à 1 tour (vainqueur de la catégorie 750)
5. DARROMAN, à 2 tours
6. MOTHE, à 2 tours
7. LOUBIERE, à 2 tours
8. DUPEYRON, à 2 tours
9. CANITROT, à 8 tours
ENGAGES DU GRAND PRIX
4 - Elie BAYOL (France) - Gordini T16 - Châssis 33 - Gordini
7 - Stirling MOSS (Angleterre) - Maserati 250F - Châssis 2508 - Moss
8 - Jacques POLLET (France) - Gordini T16 - Châssis 34 - Gordini
10 - Peter WHITEHEAD (Angleterre) - Cooper 24 - Châssis CA-1-53
12 - Froilan GONZALEZ (Argentine) - Ferrari 625 - Châssis 4 - Scuderia Ferrari
CLASSEMENT
2. Robert Manzon à 44"
3. Maurice Trintignant à 1 tour
4. Stirling Moss à 2 tours
5. Elie Bayol à 4 tours
6. Jacques Pollet à 7 tours
7. Georges Berger à 13 tours
Pole-position :
Maurice Trintignant
Meilleur tour en course :
Froilan Gonzalez en 1’22"7 (106,955 km/h)
B. Bira, culbuteurs grippés (48ème tour)
Jean Behra, boite de vitesses (35ème tour)
Harry Schell, embrayage (16ème tour)
Louis Rosier, moteur (9ème tour)
Peter Whitehead, allumage (6ème tour)
Roberto Mieres, forfait (accident aux essais)
LIENS
è Reportage sur la course réalisé par Marc Bigata, disponible auprès de La Mémoire de Bordeaux Métropole : https://www.memoirefilmiquenouvelleaquitaine.fr/films/le-grand-prix-de-bordeaux-en-1950
è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien local Sud Ouest (compte abonné obligatoire) : https://archives.sudouest.fr/download/1-10017470
è Le compte-rendu de l’épreuve dans l’hebdomadaire local L’Athlète : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4560752s/f3.item
è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien national L’Équipe : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5100517q/f2.item
è Photo de Stirling Moss doublant sous la pluie la Gordini d’Elie Bayol, issue des archives de Sud Ouest :
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