LE GRAND PRIX DE BORDEAUX DU 26 JUIN 1932 SUR LE CIRCUIT DE SAINT-MEDARD-EN-JALLES
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Affiche du GP 1932 - archives ACSO |
Alors que le Grand Prix de l'Automobile Club de France est organisé à Pau le 21 septembre 1930, la situation du sport automobile est plus délicate à Bordeaux où de nombreuses courses de côte rythment le calendrier depuis plusieurs années. Mais l'année 1931 marque un coup d'arrêt pour la discipline, l'état de la côte de Monrepos ne permettant pas le passage des concurrents et la Préfecture refusant d'accorder la fermeture de la route pour l'épreuve des Quatre Pavillons. Il faut donc trouver de nouveaux sites pour s'exprimer et si possible en profiter pour renouer avec l'aventure des Grands Prix.
Sous l’impulsion des administrations locales comme les Ponts et Chaussées et du maire Antonin Larroque, et grâce aux efforts de l’ACSO et du MCB, la commune de Saint-Médard-en-Jalles est ainsi le cadre de l’organisation d’un Grand Prix de Bordeaux, la troisième épreuve sous cette appellation Grand Prix dans la région bordelaise. L'annonce officielle est faite en mai 1932. Située à quelques kilomètres à l’ouest de Bordeaux, cette commune est, au début des années 1930, grande par la superficie mais très peu peuplée avec un peu plus de 5.000 habitants.
LA PREPARATION
Un circuit de 4,700 kilomètres est ainsi tracé en forme de triangle avec l’aménagement des chaussées nécessaire à une telle épreuve. Pour permettre les meilleures vitesses, trois longues lignes droites sont choisies, une sur la route entre Bordeaux et Lacanau, une autre sur celle entre Bordeaux et Le Porge, la troisième reliant ces deux axes entre les virages d’Hastignan et de Picot. Les tribunes principales, les pistes de ravitaillement et des officiels sont installés sur la ligne droite de Lacanau, à 800 mètres du virage de la Vierge.
Les motos devront effectuer de 47 à 63 tours du circuit. Du côté des voitures, les 750cm3, selon que le moteur est équipé d’un compresseur ou non, auront à faire 53 (sans) ou 58 tours (avec), les 1.100 cm3 58 ou 62 tours, les 1.500 cm3 62 ou 66 tours et enfin les moteurs 2 litres 66 ou 70 tours ! Le tramway suburbain, au départ du centre-ville de Bordeaux, des autobus spécialement affrétés ainsi que le train reliant Bordeaux à Lacanau permettent à un large public de se rendre sur le circuit.
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Plan du circuit du GP 1932 - Gallica |
LES COURSES ANNEXES
Pour les motos, une seule course se déroule dans la matinée du 26 juin, à partir de 8h35, suivant le même système de handicap en rapport avec la cylindrée. Des conditions de course rendues difficiles par le rythme soutenu provoquent pas moins de dix abandons parmi les 32 engagés. Confirmant ses succès précédents, Edouard Lafon l’emporte sur une 500cm3 Soyer, à la vitesse moyenne de 93 km/h. Cette moyenne, la meilleure de toutes, lui permet d’être ainsi désigné vainqueur général de la course. Dans les autres catégories, Barthe gagne en 175cm3 sur une Koehler Escoffier, Sourdot en 250cm3 sur une Monet-Goyon, et enfin André Naudon en 350cm3 sur sa Velocette.
LE GRAND PRIX
A 14h30, le départ de la course des automobiles est donné pour les 16 partants sous un grand et beau soleil estival, en présence de nombreux officiels comme Georges Sarthou, Pierre Darroman (redevenu président de la commission sportive de l’ACSO) ou François Merman (désormais secrétaire général de l’ACSO).
En 2.000 cm3 avec compresseur figurent Ducouret et Miquel, et en 2.000 cm3 sans compresseur Renaud et de Foucaud. Ces quatre pilotes sont sur Bugatti. Le plateau des 1.100 cm3 avec compresseur est composé de Rongieras (BNC), Dourel (Amilcar), Devaud (Amilcar), Felix (Lombard) et Faure (BNC), alors que celui des 1.100 cm3 sans compresseur est constitué de Demazel (Salmson), Lemasson (Salmson), Courtois (Rally) et Galoisy (La Licorne). Enfin, les derniers engagés sont Desbois (Rosengart), Lartigue (Rosengart) et Rey (Peugeot) en 750 cm3.
Le premier tour est réalisé en 2’38 par Raoul Miquel sur sa Bugatti. Une autre Bugatti, celle d’Eugène Renaud prend la tête de la course dès le 5ème tour alors que la moyenne s’établit au-delà de la barre des 100 km/h. Le leader s’arrête au 13ème tour pour ravitailler et changer un pneu, avant de repartir à la troisième place derrière la Salmson de Lucien Demazel et la Bugatti de Raoul Miquel. Après de Foucaud, Ducouret et Devaux doivent également abandonner l’épreuve. En difficulté au 19ème tour, Miquel doit rétrograder jusqu’au quatrième rang alors que Lucien Lemasson hisse sa Salmson sur le podium provisoire. Alors troisième, Renaud casse une roue au virage d’Hastignan durant le 31ème tour ! Il réussit toutefois à réparer et à continuer la course.
Finalement, et avec un tour d’avance sur son dauphin, Lucien Demazel (pilote Salmson depuis l’année précédente) termine en vainqueur ses 58 tours effectués en 2h56’30. Derrière lui suivent Lemasson, Felix, Courtois, Galoisy, Renaud… Pierre Lartigue prend de son côté une revanche sur la course du Parc Bordelais en 1929 et remporte la classe des 750 cm3, alors que treize pilotes peuvent passer le drapeau à damier et terminer ce Grand Prix. Situé dans des tribunes aménagées, le public présent a pu assister à un superbe spectacle, avec des voitures atteignant les 200 km/h sur la route de Lacanau. Les deux Salmson Grand Prix 601 qui signent le doublé avaient été engagées par Henri Laval, concessionnaire de la marque rue Fondaudège à Bordeaux depuis 1929.
Cette course reste malheureusement sans lendemain, en dehors d’une dernière épreuve spécifique aux motos dans l’enceinte du Parc Bordelais le 8 juillet 1934. Alors que le sport automobile continue son essor et se structure de plus en plus tout au long des années 1930, Bordeaux demeure absente des calendriers, nationaux ou internationaux à l'exception des passages de certains rallyes, comme le Monte-Carlo chaque année à compter de 1934 (le contrôle s'effectuant au siège de l'ACSO) ou d'épreuves plus régionales comme le Circuit du Sud-Ouest, organisé par le MCB avec la collaboration de l'ACSO dans la lignée de l'ancien Bordeaux-Les Pyrénées-Bordeaux. Mais la capitale régionale des sports mécaniques devient ainsi clairement Pau avec son tracé urbain. L’arrivée du conflit mondial gèle naturellement toutes les initiatives potentielles, et toutes les épreuves s’arrêtent…
PARTANTS
(tous français) :
2 - Raoul MIQUEL - Bugatti 2 L avec compresseur
11 – Eugène RENAUD - Bugatti 2 L sans compresseur
12 - DE FOUCAUD - Bugatti 2 L sans compresseur
25 - Auguste RONGIERAS - BNC 1100cm3 avec compresseur
26 – Emile DOUREL – Amilcar 1100cm3 avec compresseur
27 – Louis DEVAUD – Amilcar 1100cm3 avec compresseur
28 – Maurice FAURE – BNC 1100cm3 avec compresseur
31 - Lucien DEMAZEL - Salmson
32 – Lucien LEMASSON - Salmson
33 – COURTOIS - Rally
34 - André GALOISY - La Licorne
36 – Yves DESBOIS - Rosengart
41 – Pierre LARTIGUE - Rosengart
42 – Pierre REY - Peugeot
CLASSEMENTS
1. Pierre Rey
1100 cm3
1. Lucien Demazel
2000 cm3
1. Eugène Renaud
Plus de 2000 cm3
1. Raoul Miquel
Classement (toutes catégories) :
1. Lucien Demazel, 58 tours en 2h 56'30", soit une moyenne de 92,666 km/h
2. Lucien Lemasson
3. Pierre Félix
4. Courtois
5. André Galoisy
6. Eugène Renaud
7. Auguste Rongieras
8. Raoul Miquel
9. Pierre Rey
LIENS
è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien local La Petite Gironde : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4371117c/f4.item
è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien local La France de Bordeaux et du Sud-Ouest : https://www.retronews.fr/journal/la-france-de-bordeaux-et-du-sud-ouest/27-juin-1932/4/530e08f5-e728-48d5-b9f7-e447b4b0be26
è Le compte-rendu de l’épreuve dans l’hebdomadaire local L’athlète : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4559356k/f2.item
è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien national L’Auto : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4633795w/f2.item
-> Deux rétrospectives de ce Grand Prix de 1932 ont eu lieu à Saint-Médard-en-Jalles, à l’initiative du club local L’Essieu Bordelais, en juin 2008 et juin 2011. Voici une vidéo présentant les voitures de l’édition 2008 : https://youtu.be/GzZUS9I7Ry0?si=JObTTSnzb07A23Fc
Page créée en mai 2025 // dernière mise à jour en mai 2025