1928

 LE GRAND PRIX DE FRANCE DES CYCLECARS ET VOITURETTES DU 8 JUILLET 1928 SUR LE CIRCUIT DES QUATRE-PAVILLONS

Affiche du GP de 1928 - archives ACSO


Évoquée depuis l’automne 1927 et officiellement présenté le 6 janvier 1928, la tenue à Bordeaux d’une grande course est confirmée par l’UMF le 21 mars. Via sa commission sportive, l’Automobile Club de France a en effet fondé l’Union Motocycliste de France en 1913. Depuis, cette dernière organise chaque année plusieurs épreuves, comme un Grand Prix national dont l’édition 1928 doit donc se dérouler à Bordeaux. L’UMF en délègue l’organisation au Moto-Club de Bordeaux (MCB).
Fondé en 1905, le MCB est présidé entre 1913 et 1926 par Henri Lot, organisant notamment le 17 mai 1914 une épreuve disputée sur un circuit en triangle reliant Castelnau, Brach et Sainte-Hélène. Une autre édition se déroule une fois la paix revenue, le 20 juin 1920.
Président du MCB depuis 1926, Georges Sarthou développe le rallye Bordeaux-Les Pyrénées-Bordeaux et le Challenge André Vinsot, du nom d’un membre du Moto-Club tragiquement disparu. Georges Sarthou, également sociétaire de l’Automobile Club du Sud-Ouest depuis 1924, n’oublie pas de solliciter et d’impliquer nombre de ses amis de l’ACSO dans l’organisation du Grand Prix de 1928. 
Depuis l’élection de Louis Gonfreville comme président de l’Automobile Club, celui-ci a changé de nom en 1923, devenant donc Automobile Club du Sud-Ouest, a déménagé dans de nouveaux locaux sur le cours Georges-Clemenceau en 1926 et a repris la voie du sport automobile avec l’organisation de plusieurs épreuves locales. Cette collaboration avec le MCB pour ce Grand Prix s'inscrit donc dans cette optique. 

 

LA PREPARATION


Un circuit provisoire est tracé sur les coteaux de la rive droite de la Garonne, à cheval entre les communes de Lormont et de Cenon. Baptisé Circuit des Quatre Pavillons, avec un passage par ce carrefour emblématique de l’histoire du sport cycliste et automobile, le tour fait une distance respectable de 8,2 kilomètres. Ce tracé est destiné à accueillir le Grand Prix de France des motocyclettes le samedi 30 juin et le Grand Prix de France des cyclecars et voiturettes le dimanche 8 juillet 1928. Après un départ sur la route de Bordeaux, juste après les Quatre Pavillons, le tracé tourne à droite pour couper le Chemin des Gravières, offre un parcours sinueux avant de raccorder la rue de Carbon-Blanc. Ensuite, le circuit rattrape sur sa droite la RN10, offrant ainsi une très longue ligne droite aux concurrents, jusqu’au retour au carrefour des Quatre Pavillons.

Une organisation matérielle très lourde est mise en place avec l’élargissement des chaussées, de nombreux aménagements des trottoirs ou la pose de clôtures, tout en ne négligeant pas la construction de gradins provisoires et d’un tableau d’affichage sur la route de Bordeaux.

 

plan du circuit du GP de 1928 - Gallica


LES COURSES ANNEXES


Tout est en place le 30 juin pour l’épreuve réservée aux motocyclettes, avec 24 concurrents au départ d’une course unique réunissant plusieurs plateaux. Une épreuve internationale qui voit après 30 tours le succès de Marcel Jolly sur Alcyon en 175cm3, alors que l’anglais Syd Crabtree est vainqueur en 250cm3 sur Excelsior au terme de 33 tours. Enfin, en 500cm3, le trophée revient après 40 tours à l’Irlandais Stanley Woods, sur Norton, devant plus de 10.000 passionnés. Un succès pour l’organisation du MCB en prélude au Grand Prix automobile huit jours plus tard.

 

LE GRAND PRIX


En ce dimanche 8 juillet au climat estival, le circuit dessiné sur la rive droite de Bordeaux est tout d’abord emprunté par la voiture ouvreuse, une Bugatti 1.500 Sport conduite par les représentants du constructeur à Bordeaux, Léon Pierron et Eugène Renaud.

Plusieurs plateaux sont déterminés : cyclecars 1100 cm3, voiturettes 500 cm3, voiturettes 750 cm3et enfin voiturettes 1100 cm3. Et comme le veut la coutume, les concurrents doivent effectuer des distances spécifiques selon leur cylindrée, une méthode utilisée pour essayer de neutraliser les différences de puissance. Les 1100 cm3ont ainsi 40 tours à parcourir, soit 328 km, les 750 cm36 tours et les 500 cm33 tours. Le départ des douze concurrents engagés est donné à 9 heures par Georges Sarthou, qui officie comme directeur de course. Remond, Bouchillon et Dhome constituent sur Morgan-Darmont le plateau des cyclecars 1.100 cm3. En voiturettes 500 cm3, Anne-Cécile Rose-Itier est la seule engagée au volant d’une Sima-Violet, alors que Dumoret (Violet) et Demazel (Peugeot) le sont tous les deux en voiturettes 750 cm3. Le plateau le plus important réunit les voiturettes 1.100 cm3, une catégorie qui voit s’affronter les Salmson de David et Gauthier, les BNC de Faure et Rongieras, la Tracta de Bourcier et enfin l’Amilcar de Darroman. Président de la commission sportive de l’ACSO depuis 1924, Pierre Darroman est au volant de la seule voiture équipée d’un compresseur, ce qui vaut à son pilote de devoir partir avec les quinze minutes de retard imposées par le règlement. Initialement engagés tous deux sur des Salmson, Henri Laval et d’Abbadie d’Arrast sont finalement forfaits.

Les premiers tours de la course se passent sans encombre, Marcel Dhome devançant Bouchillon et Rose-Itier. Plus loin, Pierre Darroman entame dès son envol une superbe remontée. Alors qu’Hector David est le premier à abandonner à la suite d’une rupture de son alimentation en essence, la Tracta de Roger Bourcier, qui dispose de quatre roues motrices, fait preuve d’une tenue de route remarquable jusqu’à la casse d’un culbuteur qui impose son arrêt définitif peu après le 10ème tour.

Largement le plus rapide en piste, Darroman poursuit sa chevauchée et lutte dès le 20ème tour avec la BNC d’Auguste Rongieras pour mener la course. Une lutte à l’issue courue d’avance vu le rythme de l’Amilcar, ce qui permet à Pierre Darroman de remporter une superbe victoire dans la catégorie 1.100 cmet au classement toutes catégories confondues, en 3h28’9’’. Si la moyenne officiellement retenue du vainqueur est de 91,704 km/h, sa moyenne réelle compte tenu de son handicap initial est de 102,145 km/h !

 

Dans les autres catégories, Dhome remporte la course des cyclecars en 3h37’20’’, 21 secondes devant Remond, alors qu’Anne-Cécile Rose-Itier termine en voiturette 500 cmen 3h39’29’’. Et si les voiturettes 750 cm3 sont remportées par Dumoret en 3h54’20’’ face à Demazel, les 1.100 cm3 sont l’exploit de Darroman, Rongieras terminant à 5 minutes, Gauthier à 18’ et Faure à 24’. Neuf voitures franchissent la ligne d’arrivée, signe d’une belle fiabilité des pilotes et des machines.

L’organisation du MCB est saluée par la presse, L’Athlète précisant dans son édition du 10 juillet la présence de « quatre postes téléphoniques reliant les différents points difficultueux du circuit au poste central de chronométrage ; un tableau d’affichage exactement indicatif ; un haut-parleur et, enfin, un service parfait de renseignements dactylographiés à la presse ». 

Malheureusement, le circuit est considéré comme trop excentré par rapport au centre-ville de Bordeaux et certaines parties du tracé étaient en mauvais état. Lors de la réunion du comité directeur de l’ACSO du 10 juillet 1928, le président Louis Gonfreville met en avant « le gros effort fait par le Moto-Club de Bordeaux pour l’organisation à Bordeaux du Grand Prix de France pour motos et voiturettes. Malheureusement, les recettes n’ont pas couvert les dépenses ». Face à cette situation, il propose que l’ACSO participe financièrement pour aider le Moto-Club. Finalement, le déficit de l’organisation est épongé par l’ACSO et la Chambre syndicale de l’automobile sous la forme d’un prêt accordé au Moto-Club. 

PARTANTS DU GRAND PRIX

(tous français) :

3 – Maurice REMOND – Morgan-Darmont
4 – Marcel DHOME - Morgan-Darmont
5 – BOUCHILLON - Morgan-Darmont
8 – Lucien DEMAZEL - Peugeot
10 – DUMORET - Sima-Violet
11 – Anne-Cécile ROSE-ITIER – Sima-Violet
15 – Pierre DARROMAN - Amilcar
16 – Hector DAVID - Salmson
17 – Robert GAUTHIER - Salmson
18 – Maurice FAURE - BNC
20 – Auguste RONGIERAS - BNC
21 – Roger BOURCIER
 - Tracta

CLASSEMENT

(toutes catégories) :
1.Pierre Darroman en 3h28'9
2. Auguste Rongerias
3. Marcel Dhome

 

LIENS

è Le compte-rendu de l’épreuve du Grand Prix moto du 30 juin dans l’hebdomadaire Moto Revue : https://cyclememory.org/doc/B-1-0000001147/B-1-0000001147.pdf

 è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien local La Petite Gironde : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k43695955/f4.item 

è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien local La France de Bordeaux et du Sud-Ouest : https://www.retronews.fr/journal/la-france-de-bordeaux-et-du-sud-ouest/09-juillet-1928/4/d5799bc5-bfd8-4655-8dd8-16b68df0fd1a

è Le compte-rendu de l’épreuve dans l’hebdomadaire local L’Athlète : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4559150d/f2.item

è Le compte-rendu de l’épreuve dans le quotidien national L’Auto : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4632506w/f2.item

-> Le compte-rendu de l’épreuve dans le bulletin mensuel de l'Automobile Club du Sud-Ouest : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6602967j

Page créée en mai 2025 // dernière mise à jour en mai 2025